Parc Rousseau – Jardin des Lumières
Le photographe Georges Lévêque nous apporte sa vision éclairée sur le parc d’Ermenonville.
Le Parc Jean-Jacques Rousseau à Ermenonville est un concentré d’histoire et de littérature en pleine résurrection après avoir connu, au 20 ème, un siècle de déclin, voire d’abandon. Sous la houlette de sa directrice Corinne Charpentier et de son responsable des espaces paysagers Vincent Lahache, la campagne médiatique 2015 devrait être profitable en conduisant au domaine un nombre de visiteurs en augmentation.
Mais, que vient-on voir à Ermenonville ? Des jardins d’un genre nouveau lors de leur création entre 1763 et 1774 ! Des jardins qui tournent le dos aux aménagements pompeux que l’on fait depuis la Renaissance autour des demeures aristocratiques. Ermenonville, par exemple, est le contraire de Versailles. Le marquis René-Louis de Girardin fait de l’anti Le Nôtre, le « jardinier » qui au Château de Versailles avait célébré un siècle auparavant les fastes du Roi Soleil. A Ermenonville, point de perspectives gigantesques, de bassins avec des sculptures et des fontaines en nombre, d’alignements d’arbres impressionnants par la puissance qui se dégage de leurs formes taillées ; en aucun cas donc une Nature et une décoration soumises au désir du monarque !
Jean-Jacques Rousseau l’inspirateur
René-Louis de Girardin reçoit la Seigneurie d’Ermenonville à la mort de son grand-père maternel en 1762. D’autres héritages lui donnent une belle aisance financière. Sa culture générale est riche car sa formation militaire et son éducation humaniste l’ont fait voyager en Europe. Les souvenirs rapportés de Stowe, célèbre parc anglais dessiné par le paysagiste William Kent, lui indiquent une direction à suivre pour Ermenonville. La lecture des oeuvres de Jean-Jacques Rousseau fait le reste. En particulier « La Nouvelle Héloïse » roman qui connut un immense succès. Rousseau y fait la description d’un jardin qui résume un idéal : « Un terrain presque uni a reçu des ornements très simples, des herbes communes, des arbrisseaux communs, quelques filets d’eau coulant sans apprêts, sans contraintes, ont suffit pour l’embellir. (…) Je voudrais que les amusements des hommes eussent toujours un air facile qui ne fit point songer à leur faiblesse ».
Ruines et fabriques façon Hubert Robert
Les jardins d’Ermenonville vont être pittoresques, au sens de leur référence à la peinture. Les paysages peints par Nicolas Poussin, Claude Gelée dit le Lorrain et Hubert Robert, « le peintre des ruines », qui fut associé à la création du parc, en sont les sources directes. L’ambition est non seulement d’évoquer la peinture du paysage mais aussi d’inspirer les peintres. Si Ermenonville est certes un jardin, il est tout autant un projet de société qui célèbre l’émancipation de l’individu au travers de la promenade. On va où l’on choisit d’aller au gré de ses envies, guidé par le regard errant librement à la rencontre de ces tableaux paysagers.
En 1778, Jean-Jacques Rousseau est l’invité du marquis. Et c’est à Ermenonville qu’il meurt six semaines après son arrivée le 2 juillet. Le corps de l’écrivain est inhumé dans un tombeau placé sur un îlot du lac jusqu’au transfert de ses restes au Panthéon en 1794.
Pour en savoir plus : www.parc-rousseau.fr
texte & photos de Georges Lévêque